Le Zoo de Mengele
Références de l'ouvrage
NYGARDSHAUG, Gert, Le Zoo de Mengele (Mengele Zoo), traduit du norvégien par Hélène Hervieu et Magny Telnes-Tan, J’ai Lu, Paris, 2014, 409 pages.
L’auteur
Gert Nygardshaug est né en 1946. Il ne reprend pas l’exploitation agricole familiale et poursuit ses études pour devenir enseignant de philosophie, métier qu’il abandonne rapidement. Il a exercé plusieurs métiers et cultive un goût prononcé pour les voyages. Avant d’écrire Le Zoo de Mengele, l’auteur a séjourné pendant trois mois en Amazonie, où il a pu constater la déforestation et la situation précaire des Indiens en Amérique latine. Son roman paraît en Norvège en 1989 et reçoit un accueil dithyrambique (150 000 exemplaires vendus). En 2007, ce roman est élu « meilleur livre norvégien de tous les temps » par le public du Festival de Lillehammer. Le texte n’a été traduit et publié en langue française qu’en 2014. Le deuxième tome, Le Crépuscule de Niobé, est sorti en français en 2015 (éd. J’ai Lu).
Résumé
Le roman retrace le parcours en focalisation interne de Mino Aquiles Portoguesa, un enfant passionné par les papillons qu’il chasse dès son plus jeune âge. Son histoire débute par une existence simple dans un village perdu au cœur de l’Amazonie, soudainement perturbé par l’arrivée des Américains attirés par la manne pétrolière. Dès lors, le jeune garçon est entraîné dans une spirale de violence motivée par son désir de vengeance. Après avoir perdu toute sa famille dans l’incendie volontaire qui a dévasté son village, Mino est recueilli par un magicien itinérant, Isodoro, qui lui enseigne son art. Lorsque Isodoro est à son tour victime de la cruauté des « gringos », Minos gagne le littoral et achète une maison en bord de mer. Il y rencontre Maria Estrella, qui devient sa compagne. Bientôt Mino est capturé et torturé, mais échappe à nouveau à la mort et parvient à trouver une nouvelle identité d’emprunt. Avec un nouvel ami, Orlando, Mino se rend à la ville pour s’y instruire et trouver à l’Université les réponses à ses préoccupations écologiques. C’est là que se forme le groupe terroriste Mariposa, formé de deux jeunes filles, Jovina et Ildebranda, et des deux amis Orlando et Mino. Leur projet est de lutter contre les puissants qui détruisent la forêt amazonienne par leur activité économique ou leur rôle politique. Le gang Mariposa sème la terreur partout dans le monde par des assassinats à répétition, tous signés de la marque du papillon.
C’est finalement en Turquie que les quatre amis sont rattrapés par les agents à leur poursuite, et seul Mino parvient à s’échapper à la nage.
Le roman est découpé en 10 chapitres marquant les grandes étapes de la formation du protagoniste de 6 à 20 ans. Chaque chapitre est entrecoupé de passages qui rompent brutalement le cours de l’histoire de Mino : le lecteur suit la conversation de Gascoigne et Urquart, dont on découvre peu à peu qu’il s’agit de deux agents secrets chargés de retrouver le groupe Mariposa pour l’éliminer.
La présence de la question environnementale dans le texte :
Les thèmes écologiques sont-ils centraux ou marginaux dans le texte ?
L’écologie est le moteur dramatique de tout le roman : c’est le sujet qui passionne Mino et motive son action terroriste. Le roman ménage ainsi une place importante à un réquisitoire contre l’humanité (occidentale principalement) destructrice. Par ailleurs, l’expérience du jeune garçon, victime du saccage de son milieu naturel, est un témoignage édifiant de la menace que l’humain fait peser sur le vivant, y compris l’humanité. Le roman, à tous égards, est clairement militant.
Les événements liés à l’écologie sont-ils réels ou imaginaires ?
L’exploitation des ressources naturelles, et tout particulièrement du pétrole, ainsi que la déforestation des forêts primaires, au mépris de la préservation des équilibres naturels, est un phénomène réellement dénoncé par de nombreux militants écologistes tout au long du XXe siècle et jusqu’à aujourd’hui.
Le texte fait-il apparaître des personnages assimilables à des figures typiques en lien avec l’écologie ?
Les quatre étudiants qui forment le groupe Mariposa incarnent le type de l’écoterroriste, qui se caractérise par une volonté de défendre la nature contre l’humanité qui la met en danger, en usant des moyens les plus extrêmes. Toutefois, l’accent est plutôt mis sur des individualités hors du commun plutôt que sur une organisation terroriste hiérarchisée et structurée à une échelle internationale.
Citations
« Le centre du monde, c’est la jungle. Cette jungle-ci, parce qu’elle est la plus grande au monde. La jungle est l’organe le plus important de cette planète. C’est ici que vivent quatre-vingt-dix pour cent des plantes et des animaux du monde. Ici qu’est produit l’air que nous respirons. J’ai lu l’histoire du monde. Un nombre incalculable de livres d’histoire. L’Histoire des guerres de l’Humanité. Des guerres sans importance. Des guerres sans danger. Quelques milliers ou millions de personnes ont été tuées çà et là, mais qu’est-ce que ça peut faire ? Rien. Ce ne sont pas les gens qui manquent. L’âme de la planète n’a jamais été menacée. L’âme de la planète s’est juste privée d’un peu de bien-être, chaque fois qu’une nouvelle guerre a éclaté. » (p.215)
« À présent, les forêts humides primaires avec leurs secrets menaçaient d’être rasées, dévastées, anéanties. L’organisme vivant le plus actif de la planète ! Mino lui-même n’était qu’un minuscule humain sans importance. Sa vie – qu’elle soit courte ou longue –, il était prêt à la sacrifier sur l’autel de la forêt primaire. Elle ne devait servir qu’un seul but : une lutte sans merci. Si la vengeance de la forêt avait pu s’exercer, peu d’hommes auraient échappé à sa justice. Et sa vengeance aurait causé la mort, l’extermination de la race humaine.
Il y avait deux milliards de personnes en trop. Gaïa en avait des convulsions. Mino voulait bien mourir si cela pouvait soulager son supplice. » (p.307)
Mots-clefs
terrorisme / corruption / déforestation / Amazonie / responsabilité humaine
Fiche réalisée par Blandine CHARRIER