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EcoLitt, le projet de recherche sur l'écologie en littérature


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    Pepetela - Predadores

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    Predadores

    Références de l'ouvrage

    PEPETELA, Predadores, Alfragide, Dom Quixote, 2005, 383 pages, (texte en portugais, non traduit en français).

    L’auteur

    Pepetela, de son vrai nom Artur Carlos Maurício Pestana dos Santos, est né à Benguela (Angola) en 1941. Professeur de sociologie, il a longtemps appartenu au Mouvement Populaire de Libération de l’Angola (MPLA), parti marxiste au pouvoir de 1975 à 1992, et prit à ce titre part au gouvernement en tant que vice-ministre de l’Éducation durant sept ans. Son œuvre prolifique se centre principalement sur l’histoire politique du pays, dont il propose des portraits narratifs de plus en plus ironiques et satiriques. L’écriture de la nature tient également une grande place dans sa littérature. Pepetela est l’un des plus grands noms de la littérature angolaise, il a notamment obtenu le prestigieux prix Camões en 1997 pour l’ensemble de son œuvre. Il vit aujourd’hui à Lisbonne.

    Résumé

    Le roman raconte l’histoire de l’Angola de 1974 à 2004, à travers celle de Vladimiro Caposso, incarnation de l’opportunisme, de la démesure vulgaire et de la prédation sans limites qui caractérisent les élites enrichies avec l’indépendance du pays. Converti au communisme par pur opportunisme, comme l’indique l’adoption tardive par ce personnage du patronyme de Lénine, le protagoniste est un imposteur grossier, un magnat cynique et sans vergogne dont les débordements incarnent à eux seuls le mode d’être de la bourgeoisie qui émerge après la guerre coloniale, que l’auteur dépeint comme cruelle, ignare et corrompue. Vladimiro n’hésite pas à falsifier sa biographie, à s’inventer un passé de guérillero révolutionnaire ou à adopter publiquement les langages marxistes alors en vigueur afin de conquérir toujours plus de pouvoir. Clientélisme, bureaucratie, trahisons multiples, exubérance : l’ascension et les manigances de Caposso et des siens sont décrites avec froideur et ironie par un narrateur impitoyable. À mesure que Caposso amasse sa fortune et édifie son empire sur le dos des populations, d’autres s’appauvrissent et se trouvent ruinés ou violemment spoliés. Dans la province de Huíla, Caposso fait construire une gigantesque demeure coloniale avec golf, lac artificiel, piscine, cascade, où convergeront en avion les ministres et toute l’élite politique du pays. Cette appropriation indue du territoire entraîne une privatisation des chemins qui empêche les éleveurs locaux d’assurer la transhumance de leurs troupeaux, alors que les populations autochtones se voient privées de l’eau qui les faisait vivre au quotidien. La maison, dont le portrait s’étend sur plusieurs chapitres, symbolise la connivence du gouvernement et des élites dans l’expropriation générale des terres et des ressources nationales. Ce conflit avec les populations aura des retentissements négatifs sur l’avenir politique de Caposso, qui se fait à cette occasion un certain nombre d’ennemis ­– certains fantômes surgissant du passé pour dénoncer publiquement son imposture – sans que cela ne menace toutefois sa position. Caposso, qui possède une tour Eiffel illuminée dans son jardin, est l’emblème de l’imposture éthique et politique de nombreux révolutionnaires angolais dont Pepetela entend se démarquer en brossant ce portrait national sans concessions. Les membres de la famille de Caposso, mais aussi ses relations, illustrent l’attachement à la propriété privée d’une élite à la rhétorique marxiste pourtant bien rôdée, mais plus généralement aussi le cannibalisme et le mode de vie nuisible des classes dominantes, leur absence d’éthique et d’empathie.

    La présence de la question environnementale dans le texte :

    Les thèmes écologiques sont-ils centraux ou marginaux dans le texte ?

    Les deux à la fois. À première vue, le roman déroule trente ans de l’histoire récente de l’Angola et ne prend pas explicitement l’écologie pour thématique. En y regardant à deux fois, on s’aperçoit pourtant que la thématique de l’accumulation prédatrice, qui donne son nom au livre, est absolument centrale, dans la mesure où il s’agit ni plus ni moins pour Caposso d’acheter le pays tout entier, de s’approprier criminellement des terres et des ressources qui ne lui appartiennent pas afin d’augmenter et d’exhiber sans frein sa puissance personnelle. La trajectoire du personnage principal peut ainsi être lue comme la métaphore d’un régime d’accumulation cruel, sans limites, aveugle et dramatiquement glouton.

    Les événements liés à l’écologie sont-ils réels ou imaginaires ?

    Imaginaires que l’on sache. La résidence secondaire qu’acquiert Caposso dans la province de Huíla, dans laquelle il fait construire piscine, golf ou lac artificiel au détriment des autochtones, dont sa mégalomanie perturbe les coutumes ancestrales, n’a pas à notre connaissance d’équivalent historique. Or, elle est l’emblème à peine exagéré d’une gabegie et d’une pratique de spoliation généralisée qui, elles, ont réellement (eu) lieu.

    Le texte et/ou les images font-ils apparaître des personnages assimilables à des figures typiques en lien avec l’écologie ?

    Oui. Tous ceux que Caposso s’emploie, directement ou indirectement, à déposséder, et qui luttent en retour pour assurer leur survie, peuvent être considérés comme des personnages écologiques à proprement parler. C’est le cas des autochtones et éleveurs traditionnels de la province de Huíla, où Vladimir Caposso fait bâtir sa résidence secondaire aux proportions gigantesques. Les communautés locales, aidées de certains religieux ou porte-paroles traditionnels, tentent de faire entendre leur voix afin par exemple de pouvoir assurer le déplacement ou la nourriture des troupeaux grâce à un fourrage de qualité qui, jusqu’à l’arrivée de Caposso, poussait en abondance dans la région.

    Citation

    "[...] A casa era importante, uma enorme mansão de estilo colonial americano, isto é de dois pisos, com um pórtico e colunas de entrada, varandas a toda a volta, inteiramente branca, como aquelas construções existentes na Virgínia e que aprendemos a conhecer em filmes. O projecto, aliás, tinha sido inspirado numa revista especializada em arquitectura americana. [...] Tinha oito quartos de dormir, todos grandes e com casa de banho associada, duas enormes salas e mais um salão para bilhar e outros jogos. [...] Para além da mansão, havia também uma casa de apoio, de um só piso, onde podiam morar de dez a vinte serviçais, dormindo em quartos com beliches duplos, um njango para cinquenta pessoas dispostas em mesas, um armazém, um heliporto, uma piscina, dois campos de ténis e uma pista para corridas, de cavalos, cães, cágados, o que fosse. A água vinha do rio Culala, aspirada por motores até um grande tanque elevado, descendo depois por gravidade para as torneiras e sistema de rega. Como o rio não estava poluido, não sendo usado dali até a nascença por nenhuma população, bastava um ligeiro filtro na saída do tanque para se obter uma água natural de alta qualidade." (p. 271-272)

    "La maison en imposait, une énorme demeure de style colonial américain : deux étages, un portique et des colonnes à l’entrée, des terrasses couvertes tout autour, entièrement blanche, comme ces constructions typiques de Virginie que l’on voit dans les films. Le projet, d’ailleurs, était inspiré d’une revue spécialisée en architecture américaine. [...] Il y avait huit chambres, toutes grandes et jouissant chacune d’une salle-de-bains attenante, deux énormes séjours, ainsi qu’un autre salon pour le billard et les autres jeux [...] En plus de la villa elle-même, il y avait aussi une maison secondaire, d’un seul étage, où pouvaient vivre dix à vingt domestiques, dormant dans des chambres agrémentées de lits superposés, une salle commune pouvant accueillir cinquante personnes attablées, un magasin, un héliport, une piscine, deux courts de tennis et une piste pour les courses – de chevaux, de chiens, de tortues de terre, de n’importe quoi. L’eau provenait de la rivière Culala, aspirée par des moteurs jusqu’à un grand réservoir placé en hauteur, pour descendre ensuite sous l’effet de la gravité jusque dans les robinets ou le système d’arrosage. Comme la rivière n’était pas polluée, n’étant utilisée en amont par aucune population, il suffisait de placer un léger filtre à la sortie du réservoir pour obtenir une eau naturelle de grande qualité." (trad. Anne-Laure Bonvalot)

    Mots-clefs

    responsabilité humaine / corruption / justice environnementale / anticolonialisme / écologisme populaire

     

     

    Fiche réalisée par Anne-Laure BONVALOT                                     

    Catégorie générique

    Roman