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EcoLitt, le projet de recherche sur l'écologie en littérature


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    Nadja Bucher - Rosa contre la saleté du monde

    Nadja Bucher - Rosa contre la saleté du monde

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    Rosa gegen den Dreck der Welt

    Références de l'ouvrage

    BUCHER, Nadja, Rosa gegen den Dreck der Welt (Rosa contre la saleté du monde), Milena Verlag, Wien, 2011, 207 pages. (non traduit en français)

    L’auteur

    Viennoise, Nadja Bucher a suivi des études d’allemand et d’histoire de l’art dans sa ville et en Angleterre (University of Sussex). Elle a bénéficié de plusieurs bourses et prix pour ses débuts littéraires (notamment le Bundeskanzleramt autrichien). Avant Rosa gegen den Dreck der Welt (Rosa contre la saleté du monde), qui est son premier roman, elle a multiplié les travaux collectifs entre radio, lectures et performances théâtrales, notamment autour de slams poétiques réalisés de Graz au Liechtenstein et du sud de l’Allemagne à Ljubljana (Mundpropaganda, Propagande de bouche, 2011). Plus récemment est paru son deuxième roman, Die wilde Gärtnerin (La jardinière sauvage) : ce nouvel opus, toujours chez Milena (2013), met une nouvelle fois en scène la confrontation d’un care potager ou domestique féministe avec la finance prédatrice et viriliste.

    Résumé

    Femme de ménage chez plusieurs clients viennois, ni vraiment hygiéniste ni hypocondriaque mais fuyant toute relation sociale, Rosa ne travaille qu’avec son vinaigre bio, son seau et son balai en bois, se tenant à distance de l’aspirateur comme du téléphone portable, assaillie de remords par le moindre trajet doté d’un impact carbone (quand la météo l’empêche d’aller à vélo) et par l’usage des produits chimiques. En focalisation interne, le récit cocasse de ses ménages, du plus dur de l’hiver au printemps final, illustre le mépris et l’invisibilité dans lesquels évolue celle qui ne veut laisser aucune trace. Sa sortie ciné mensuelle est consacrée à des documentaires critiques qui la convainquent d’un déclin général que l’humanité s’infligerait à elle-même. S’étant donné pour mission de sauver le monde, elle se rend indispensable aux femmes qui l’entourent, qui voient souvent en elle leur seule alliée dans la lutte quotidienne contre le chaos. C’est qu’en plus des gestes concrets pour la planète, Rosa est la confidente intergénérationnelle de toutes les douleurs féminines, de sa jeune amie bosniaque Ludmilla, venue nettoyer les hôpitaux psychiatriques autrichiens pour aider sa famille frappée par la guerre, à la vieille Frau Helmberger, condamnée à supporter un mari acariâtre et violent. La routine laisse place à des faits intrigants, comme la mort d’un client obsédé par ses plantes à qui il laisse toute la place dans son appartement au point d’en être empoisonné à son insu. Enquêtrice malgré elle, Rosa tente d’y voir clair dans les contradictions intimes de ses clients, à l’image de Frau Hatschek, l’énigmatique cliente qu’elle n’a jamais vue et chez qui le nec plus ultra du bio équitable cohabite avec les pires fautes écologiques. Déchirée par sa conscience (à mesure que le roman révèle son passé complexe), Rosa se décide à faire de ce lieu un sanctuaire modèle à l’abri du monde, avant que celui-ci ne lui signifie son congé à l’occasion des vacances.

    La présence de la question environnementale dans le texte :

    Les thèmes écologiques sont-ils centraux ou marginaux dans le texte ?

    Quasi allégorie de la lucidité et de la conscience, Rosa perçoit le monde avec un regard radicalement écologiste et épris de justice sociale. S’en référant à la raison, elle évalue les modes de vie de toute une société industrialisée, néo-coloniale et urbaine, jetant un éclairage redoutablement efficace et sans dogmatisme — parce que plein d’humour — sur le gaspillage, l’esseulement, la slow violence et l’aveuglement généralisés qu’impliquent l’économie mondiale.

    Les événements liés à l’écologie sont-ils réels ou imaginaires ?

    L’empreinte écologique des modes de vie fait l’objet d’une étude concrète, documentée et même chiffrée, des bois exotiques et du plastique des jouets aux méfaits sanitaires et sociaux, à échelle mondiale, d’aliments comme la viande et le chocolat, en passant par les métaux omniprésents, les ondes et la consommation électrique, tous phénomènes qui sont mesurés précisément et comparativement. Tout est non seulement vraisemblable mais scientifiquement attesté et éthiquement évalué.

    Le texte fait-il apparaître des personnages assimilables à des figures typiques en lien avec l’écologie ?

    Radiographie des habitudes de consommation invisibles d’une société entière (notamment des chaines de production et de pollution ou de recyclage que suppose le moindre objet banal), le roman constitue une satire radicale et à la fois très drôle de plusieurs types sociaux, de la famille gâtée baignant dans l’électrosmog et dépensant ses gros salaires en salles de sport, en voyages et séances de bronzage superficiels, au retraité aigri et raciste, recroquevillé sur ses maquettes de train électrique. De façon intéressante, la satire n’exclut pas les écologistes eux-mêmes, à l’instar de Bertram, qui tient une irréprochable boutique bio mais vit dans une arrière-boutique très énergivore. Concernant Rosa, elle est aussi entière et idéaliste dans sa quête que peu démonstrative sur un plan militant. Son personnage de justicière solitaire et invisible, au seuil de l’anti-héroïsme, l’assimile au cliché de la « sorcière » écologiste.

    Citation

    « Rosa en avait fini une demi-heure plus tôt que prévu avec l’appartement de Monsieur Novotny. Même si elle devait courir le risque de toucher moins d’argent, il lui fallait s’éloigner aussi vite que possible de cette odeur. L’idée de ces femmes munies de charlottes en plastique et de gants en latex, fourrant à la chaine des carrés de cordon-bleu dans des rectangles de plastique, le lui commandait. Monsieur Novotny ne remarqua pas l’accélération de son tempo et paya le montant total. Il était comblé par la portion de viande toute prête ingérée par son organisme. Triphosphate, ascorbate de sodium, poly-, di-phosphates de sodium et de calcium, qui ne causaient en toute vraisemblance pas directement de mutation génétique, ne le dérangeaient pas encore. » (p. 89) (traduction B. Guest)

    Mots-clefs

    Autriche / consommation / écoféminisme / justice environnementale / responsabilité humaine / pollution / ville

     

     

    Fiche réalisée par Bertrand GUEST

    Catégorie générique

    Roman